Mesurer l'hétérogénéité des tumeurs

Les tumeurs ne sont pas homogènes. Cela complique considérablement le diagnostic et le traitement. Des chercheurs de l'Université de Zurich et de l'ETH Zurich ont désormais développé un nouveau procédé d'imagerie qui leur permet de visualiser les différents types de cellules cancéreuses d'une tumeur dans votre environnement de manière beaucoup plus précise qu'auparavant.

Vue agrandie : cellules cancéreuses
Les cellules cancéreuses sont hétérogènes. Une nouvelle méthode permettra à l'avenir de mieux l'appréhender. (Image : istockphoto.com - vitanovski)

Le cancer est la deuxième cause de mortalité en Suisse. Le fait que, même à l'époque de la médecine de pointe, il reste difficile de guérir cette maladie a de nombreuses raisons : une tumeur peut par exemple être composée de différentes cellules tumorales, qui possèdent chacune leur propre profil et réagissent différemment aux thérapies - ou pas du tout. De plus, les cellules cancéreuses et les cellules saines de l'organisme interagissent et communiquent entre elles. Comme moyen de communication, elles utilisent différentes molécules, dont des facteurs de croissance. Le développement final d'une tumeur et la formation ou non de métastases dépendent de manière décisive des signaux qu'une cellule tumorale reçoit de son environnement.

Bernd Bodenmiller de l'Institut de biologie moléculaire de l'Université de Zurich, l'équipe de recherche de l'Université de Zurich a réussi à mettre au point une nouvelle technique. Groupe de recherche sur les oligo-éléments et la microanalyse du professeur Detlef Günther de l'ETH et de l'Hôpital universitaire de Zurich a réussi à visualiser de manière exhaustive des cellules tumorales provenant d'échantillons de patients. Cette méthode prometteuse vient d'être présentée dans "Nature Methods".

Une nouvelle méthode d'imagerie est une grande opportunité

Déterminer les profils cellulaires d'une tumeur, leurs relations de voisinage et le traitement de l'information au sein des cellules et entre elles est extrêmement complexe. En effet, il faut pour cela mesurer les biomarqueurs, c'est-à-dire des molécules spécifiques pouvant être attribuées à différents types de cellules cancéreuses, et les voies de traitement des signaux dans leurs relations spatiales. "Notre technique permet de réaliser ce relevé global grâce à un procédé d'imagerie récemment mis au point, qui permet déjà de saisir simultanément 32 biomarqueurs et en saisira plus de cent dans un avenir proche", explique Bernd Bodenmiller, responsable de l'étude. L'imagerie de pointe permet en outre de conserver les informations sur les relations de voisinage des cellules et de visualiser leur influence directe sur le traitement et la transmission cellulaires des informations.

La nouvelle technique est basée sur l'amélioration de techniques établies. Pour ce faire, les chercheurs utilisent des échantillons de tissus de quelques micromètres (millionièmes de mètre) d'épaisseur. Les biomarqueurs sont marqués avec des anticorps. Ceux-ci sont à leur tour marqués par différents isotopes métalliques, qui peuvent être détectés par spectrométrie de masse. A l'aide d'un système laser spécial, développé dans le laboratoire de Detlef Günther, les scientifiques enlèvent les quantités les plus infimes de matériau d'échantillon sous forme de particules. Les particules sont transportées efficacement dans un spectromètre de masse rapide et sensible, qui mesure ensuite avec précision les quantités d'isotopes métalliques. À partir de ces données, les chercheurs calculent les signatures des cellules (cancéreuses) présentes dans les tissus.

La nouveauté réside dans le fait que les biomarqueurs sont rendus visibles avec des isotopes métalliques purs au lieu de colorants. De plus, le spectromètre de masse est en mesure de détecter simultanément 100 isotopes métalliques différents et donc des biomarqueurs. "Cela permet de contourner le problème du nombre limité de couleurs dans l'analyse d'échantillons biologiques par immunofluorescence", explique Bodenmiller.

Deuxièmement, l'information sur les cellules qui jouent un rôle important dans le traitement et la transmission des signaux d'une tumeur ne reste plus de nature qualitative : la nouvelle technique de mesure permet de déterminer avec précision quelles cellules ont quelle influence. Cela permettrait de découvrir des points faibles, ce qui contribuerait à développer de nouvelles approches thérapeutiques. C'est pourquoi, selon Bodenmiller, il devient de plus en plus important de comprendre et d'intégrer ces interactions pour le diagnostic et la thérapie.

Méthode validée avec des échantillons de tissus

Les premiers résultats de mesure obtenus par les chercheurs avec cette nouvelle technique sur des échantillons de cancer du sein mettent en évidence l'hétérogénéité de ces tumeurs : certaines souffrent d'un manque d'oxygène en raison d'une forte multiplication de cellules en leur sein, d'autres abusent des cellules immunitaires de l'organisme pour favoriser leur croissance. L'emplacement des cellules au centre ou à la périphérie de la tumeur a également une influence décisive. Une chose est sûre : aucune tumeur ne ressemble à une autre et, selon Bodenmiller, les thérapies devraient être adaptées en conséquence. Dans une prochaine étape, son équipe de recherche veut découvrir, grâce à la nouvelle méthode de mesure, quel est le rôle de la communication cellulaire et du traitement cellulaire de l'information dans l'apparition des métastases.

Ce texte a été rédigé par Media Relations de l'Université de Zurich et publié sur le site de l'EPFZ. page externewww.mediadesk.uzh.ch publié en premier lieu.

Référence bibliographique

Giesen C, Wang HAO, Schapiro D, Zivanovic N, Jacobs A, Hattendorf B, Schüffler PJ, Grolimund D, Buhmann JM, Brandt S, Varga Z, Wild PJ, Günther D & Bodenmiller B. Imagerie hautement multiplexée de tissus tumoraux avec une résolution subcellulaire par cytométrie de masse. Nature Methods, publié en ligne le 2 mars 2014. DOI : page externe10.1038/nmeth.2869

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