Les odeurs corporelles révèlent l'infection par le paludisme

Une infection par des agents pathogènes du paludisme modifie le parfum personnel des souris infectées. Cela les rend plus attractives pour les moustiques. C'est ce que montre une équipe de chercheurs de l'ETH Zurich et de la Pennsylvania State University dans une nouvelle étude.

Vue agrandie : anopheles moustique
Les souris infectées par la malaria ont une odeur particulièrement attractive pour les moustiques qui transmettent la maladie. Il est possible que cela s'applique également aux humains. (Image : CDC/James Gathany)

Le paludisme reste une maladie redoutable, transmise à l'homme par les moustiques anophèles. L'agent pathogène est un protozoaire animal du genre Plasmodium. Sans traitement, le paludisme peut être mortel. Les agents pathogènes ont toutefois un problème : pour achever leur cycle de vie, ils doivent retourner dans un moustique. En piquant une victime déjà infectée, l'insecte absorbe l'agent pathogène.

L'agent pathogène en phase de reproduction fait sentir le plus fortement ses victimes

Les chercheurs montrent dans une nouvelle étude qui vient d'être publiée dans PNAS que l'agent pathogène ne laisse pas au hasard le fait que le moustique trouve la bonne victime. Les plasmodiums dont les chercheurs ont infecté des souris font en sorte que la marque olfactive caractéristique d'un animal infecté se modifie. Cela rend le sponsor de la maladie plus attractif pour les moustiques affamés.

Les souris infectées les plus irrésistibles pour les moustiques étaient celles qui présentaient une forte concentration de gamétocytes, les cellules sexuelles des plasmodiums, dans leur sang. Si le moustique les absorbe avec son sang, les cellules sexuelles entament un nouveau cycle de développement dans l'intestin du moustique.

Pas un cocktail unique de composants

Cependant, les agents pathogènes ne semblaient pas déclencher la formation de composants odorants spécifiques et uniques. Les chercheurs n'ont pas trouvé de composants présents uniquement chez les souris infectées. Les germes du paludisme ne font qu'augmenter les niveaux de composants odorants que les scientifiques ont déjà pu détecter chez des individus sains. "Il semble que l'agent pathogène déclenche la formation accrue de plusieurs composants odorants qui attirent les moustiques", explique Consuelo De Moraes, professeure de biocommunication et d'écologie à l'ETH Zurich.

Pour les chercheurs, il est logique que les personnes infectées aient une odeur attrayante, mais ne produisent pas de substances odorantes hautement spécifiques, notamment parce que l'agent pathogène de la malaria a également des effets négatifs sur les moustiques. "Les moustiques n'ont aucun avantage à piquer les personnes infectées. Pour l'agent pathogène, il est donc plus judicieux de renforcer une marque olfactive qui attire de toute façon les moustiques", explique Mark Mescher, responsable de l'étude.

Ce qui a le plus surpris les chercheurs, c'est le fait que l'infection par la malaria façonne l'odeur corporelle tout au long de la vie. Même lorsque les souris infectées ne présentaient plus de symptômes, leur odeur personnelle indiquait qu'elles étaient porteuses de l'agent pathogène. Cependant, tous les stades de la maladie n'ont pas la même odeur. Le profil olfactif des personnes atteintes d'une maladie aiguë différait de celui des individus aux stades ultérieurs de la maladie.

Tests olfactifs chez l'homme

Les résultats obtenus sur les rongeurs ne sont pas directement applicables aux cas de paludisme humain. Elles indiquent toutefois que des effets olfactifs comparables conduisent plus facilement les moustiques vers les personnes infectées. Mescher et De Moraes sont donc déjà en train d'étudier cette idée sur des humains en Afrique. Ils souhaitent découvrir comment la voie de transmission du paludisme pourrait être interrompue. Les chercheurs espèrent en outre que leurs découvertes pourront être utilisées pour développer un nouvel outil de diagnostic non invasif. Celui-ci faciliterait considérablement le dépistage de l'infection par le paludisme au sein de la population. Il permettrait notamment de détecter les individus qui ne présentent plus de symptômes, mais qui continuent à servir de réservoir et de vecteur de l'agent pathogène au moustique.

Référence bibliographique

De Moraes C et al. Scent of disease : Malaria-induced changes in host odors enhance mosquito attraction. PNAS early edition, published online 30th June 2014. doi : page externe10.1073/pnas.1405617111

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