Des aimants miniatures pour les futures mémoires de données

Une équipe internationale de chercheurs, dirigée par des chimistes de l'ETH Zurich, a mis au point une nouvelle méthode pour équiper une surface d'atomes individuels magnétisables. Cette méthode est particulièrement intéressante pour le développement de nouveaux supports de données minuscules.

Magnétisation
L'aimantation des atomes de dysprosium (en vert) à la surface des nanoparticules peut prendre exactement deux directions : "spin up" ou "spin down". (Graphique : ETH Zurich / Université de Rennes)

L'idée est fascinante : il serait possible de stocker d'énormes quantités de données dans un espace très réduit si, pour une unité d'information (un zéro ou un un dans la technique numérique binaire), il suffisait d'un seul atome ou d'une petite molécule. En théorie, c'est possible, car certains atomes peuvent être magnétisés de manière à ce que l'aimantation ne puisse prendre que deux directions : "spin up" ou "spin down". La succession des directions d'aimantation de nombreuses molécules permettrait ainsi de stocker des informations.

Il reste toutefois quelques obstacles à surmonter sur la voie du stockage de données magnétiques à molécule unique. Trouver des molécules capables de stocker l'information magnétique non seulement à court terme, mais aussi de manière durable, n'est pas chose aisée. Et il est encore plus difficile de disposer de telles molécules sur un support solide pour la construction de mémoires de données. Pour ce dernier point, une équipe internationale de chercheurs dirigée par des chimistes de l'ETH Zurich a créé une nouvelle méthode. Elle présente de nombreux avantages par rapport à d'autres approches.

Un atome fusionné avec la surface

Christophe Copéret, professeur au Laboratoire de chimie inorganique de l'ETH Zurich, et son équipe ont mis au point une molécule au centre de laquelle se trouve un atome de dysprosium (le dysprosium est un métal qui fait partie des terres rares). Cet atome est entouré d'une structure moléculaire qui sert de véhicule de transport. En outre, les scientifiques ont développé une méthode pour déposer les molécules à la surface de nanoparticules de dioxyde de silicium et les fusionner avec celles-ci à 400 degrés Celsius. L'échafaudage de transport se désagrège alors et il se forme des nanoparticules dont la surface est parsemée d'atomes de dysprosium isolés. Les tests ont montré que ces atomes peuvent être magnétisés et qu'ils conservent leur direction de magnétisation.

Mécanisme
Des molécules centrées sur un atome de dysprosium (en bleu) sont d'abord déposées à la surface d'une nanoparticule de silice (en rouge et orange), puis fusionnées avec celle-ci. (Graphique : Allouche F et al. ACS Central Science 2017)

Actuellement, la magnétisation ne fonctionne qu'à environ moins 270 degrés Celsius (proche du zéro absolu) et ne dure qu'un peu plus d'une minute et demie au maximum. Les scientifiques sont donc à la recherche d'approches permettant de maintenir la stabilité de la magnétisation à des températures plus élevées et sur une plus longue durée. Et ils sont à la recherche de méthodes permettant de fusionner les atomes avec un support plat plutôt qu'avec des nanoparticules.

Une fabrication facile

Parmi les avantages de la nouvelle méthode figure le fait qu'elle est très simple. "Les nanoparticules équipées de dysprosium peuvent être fabriquées dans n'importe quel laboratoire de chimie. Il n'est pas nécessaire de disposer d'une salle blanche ou d'un appareillage complexe", explique Florian Allouche, doctorant dans le groupe de Copéret. De plus, les nanoparticules magnétisables peuvent être conservées à température ambiante et sont réutilisables.

Les méthodes de fabrication alternatives consistent par exemple à vaporiser une surface avec des atomes individuels. Les matériaux ainsi fabriqués ne sont toutefois stables qu'à très basses températures. Ou encore, des molécules aux propriétés magnétiques idéales peuvent être déposées sur un support. Cependant, lors de ce processus, les propriétés magnétiques sont souvent influencées négativement.

Dans le cadre de ce projet de recherche, les scientifiques de l'ETH ont collaboré avec des collaborateurs des universités de Lyon et de Rennes, du Collège de France à Paris, de l'Institut Paul Scherrer à Villigen et du Berkeley National Laboratory aux États-Unis.

Référence bibliographique

Allouche F et al. : Mémoire magnétique du Dy(III) isolé sur site sur des matériaux de silice. ACS Central Science 2017, doi : page externe10.1021/acscentsci.7b00035

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